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Le modèle de Sparte

réf. : fr.1510.2016 | 15 juillet 2016 | par Francis Leveque
modèle | 1ère moitié du Ier siècle ap. J.-C.
Péloponnèse ( Grèce )
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Galère cataphracte à un rang de rames, peut-être le modèle d’une quinquérème romaine utilisée comme ex-voto

En 1950, un pêcheur de Gytheion, ancien port de guerre de Sparte, remonte dans ses filets ce modèle de guerre en terre cuite à un endroit profond de 11 m où n’existe aucune épave ni aucune ruine submergée. Il en fit don à un marchand qui le remit au musée de Sparte. L. Basch le retrouve brisé au musée et suit sa restauration de près.

La plupart des points de comparaison n’étant pas antérieurs à l’époque augustéenne, ce modèle peut être daté du Ier s. ap. J.-C.

Dimensions :
- Longueur : 58 cm

Le modèle est fait d’une argile d’un brun rougeâtre et il est encore couvert de concrétions marines. Il ne manque que l’étambot et des tronçons des deux poutres longitudinales, supportées par des étais, au bas des deux côtés de la coque. L. Basch observe des traces de peinture lors de sa visite au musée en 1986.

L’aspect extérieur perdu

Le gaillard d’avant, le pont supérieur et les pavois sont percés de petits trous ronds dans lesquels on a pu fixer des appliques en bois ou en métal. Son aspect d’origine devait donc être très différent. Les petits trous percés dans le pavois du pont supérieur ont pu servir à fixer des boucliers (ce qui n’est pas de tradition grecque). Le pavois avant peut aussi avoir été constitué d’une plaquette métallique et prolongé par un « faux stolos » comme on le voit sur d’autres documents, notamment sur l’arc d’Orange. Sur la face supérieure plane du gaillard d’avant, les 4 petits trous (L et K d’un diamètre supérieur) ont pu servir à fixer ce faux stolos ou une autre figure de proue.


Proues de navires romains sur l’arc d’Orange

Plutarque (Lysandre,18) évoque une galère d’or et d’ivoire offert par Cyrus à Lysandre et déposée à Delphes, qui a dû être couverte de ces matières précieuses avec le même procédé.

La coque

Au niveau de la ligne de flottaison, un bourrelet parcourt toute la longueur de la coque, de l’étambot à l’éperon. Il présente une rainure sur toute sa longueur qui rappelle les doubles préceintes accolées de document plus tardifs.

La proue

A l’avant une poutre massive se détache horizontalement et obliquement de la coque (elle est brisée à tribord). Pour L. Basch ce sont des épotides, que l’on retrouve habituellement incorporées à la caisse de rames ou juste devant elle. Elles ont pu servir à fracasser les coques de navires ennemis. Elles peuvent aussi avoir servi à écarter un danger extérieur comme une attaque ennemi ou lors d’un accostage au port.

Cette position des épotides à hauteur de l’éperon a peut-être inspiré Artémidore (Strabon, III, 1, 4) qui décrivait le cap Saint Vincent en le comparant à un navire : « trois petites îles contribuent à lui donner cette forme, l’une de ces îles occupant l’emplacement de l’éperon, et les deux autres celui des épotides ».

Une autre petite poutre (F) émerge perpendiculairement de chaque côté de la coque, au dessus des épotides, accolée au gaillard d’avant. Elle est percée d’un petit trou vertical. Ce sont les bossoirs qui permettaient de suspendre l’ancre à l’extérieur et dont la corde ou la chaîne passait pas le trou.

La poupe

La poupe est masquée par un grand panneau de chaque côté et donne à ce modèle un profil original. Pour L. Basch il s’agit d’une draperie liturgique dont il retrouve des exemples bien plus tardifs mais aussi antérieurs qui figurent sur deux vases grecs. Ce détail le confirme dans son interprétation : la draperie devait avoir un caractère religieux, vraisemblablement un ex-voto jeté comme tel à la mer.

La face supérieure plane de la poupe comporte un trou (P) qui a pu servir à fixer un aphlaston.

On peut également restituer la présence d’un timonier manipulant deux gouvernails. En effet la poutre horizontale (C) émergeant de la poupe, juste devant le panneau de draperie, a pu leur servir de support. Et les deux petits canaux percés verticalement (G et G’) du panneau de poupe a pu servir à fixer les mèches des gouvernails. De plus cette poutre est percée en son milieu, là où précisément on s’attendrait à y trouver un timonier.

Un seul rang de rames

L’intérieur de la coque est vide. Il n’existe aucune trace d’un banc pour les rameurs, aucun sabords de nage. Ce navire ne pouvait donc être propulsé que par un rang de rames qui prenaient appui sur la poutre extérieure brisée qu’on peut donc nommer apostis.

                    

Bibliographie :

  • L. Basch, Le musée imaginaire de la marine antique (MIMA), Institut hellénique pour la préservation de la tradition nautique, Athènes , 1987, p.428-435, n° 936-943
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