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Les navires de guerre puniques de Marsala

réf. : fr.1904.2019 | 8 février 2019 | par Francis Leveque
épave | Milieu du IIIe siècle av. J.-C.
Sicile ( Italie )
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Tout a commencé ici, par la publication de ce navire. Un jeune étudiant ne peut que rêver devant ces restes de navires de guerre échoués sur la plage. Mais le rêve ne peut devenir la réalité : les interprétations fantaisistes risquent de détruire le mythe.

Les navires évoqués ici ont été repérés dans la zone dite Punta Scario, à proximité de l’actuelle Marsala (Lilybée ou Lilibeo en grec et en latin Lilybaeum), en Sicile, en 1969, puis fouillées à partir de 1971 par les autorités siciliennes et la British School at Rome qui demandèrent à l’archéologue Honor Frost. Des rapports annuels furent publiés dans International Journal of Nautical Archaeology. Le rapport final a été publié par l’Accademia Nazionale dei Lincei en 1981.

Une discussion existe sur la nature des navires échoués. Pour Honor Frost les navires de Marsala sont deux navires de combat. Hédi Dridi, à la suite de Piero Bartoloni, considère qu’ils devaient jouer le rôle de navette car ces navires sont petits et dépourvu de rostre. Il peut s’agir également d’un navire marchand et d’un navire long. Y. Lebohec y voit deux galères de type liburne, à un rang de rames, mesurant 34 m de long pour 4,80 m de large. Mais A. Guillerm estime qu’on a affaire à de vraies quinquérèmes comme les a décrites Polybe.

L’épave n°1 est désormais conservée au Musée archéologique Baglio Anselmi situé à Marsala.

La première épave

En 1971 l’arrière d’un bateau punique a été découvert à 2,50 mètre de profondeur. Les vestiges représentent 12 m de quille de la poupe et du bordé bâbord sur 3 m de large. Le bordé est constitué de bois de pin, pinus nigra plutôt que pinus siluestris [1]. La quille et la poupe étaient en bois d’érable mais la portion centrale de la quille en pin. Tandis que les couples et les varangues sont en chêne et en érable. Les tenons et les chevilles étaient en chêne. Mais il existe aussi d’autres essences de bois, comme le cèdre et la pistache.
Les membrures sont de 10 à 12 cm de largeur et elles sont très faiblement espacées pour assurer une forte solidité à la coque.

L’absence de récipients de stockage des denrées nécessaires pour alimenter les hommes pendant un trajet en haute mer est l’argument principal pour voir en cette épave un navire de guerre.
Un chargement de pierre a servi de ballast pour lester le navire. Ces pierres d’origine volcanique ont libéré beaucoup d’imaginations. On a émis l’hypothèse d’une provenance de Pantelleria, une île située entre la Sicile et Carthage, mais une provenance du nord du Latium semble plus probable, bien que cela ne facilite pas l’interprétation.

L’archéologue H. Frost a estimé des l’époque des fouilles que ce navire était un navire long, de type galère. Pour Rossella Giglio [2] la longueur du navire était de 35 m, la largeur de 4,80 m, le tonnage de 120 tonnes. La longueur du bateau permettrait d’exploiter 17 avirons de chaque côté. Elle estime que l’équipage se composait alors de 68 rameurs, 34 par côté, 2 rameurs par aviron, auxquels il faut ajouter l’équipage et les soldats embarqués.
Pour Maurizio Vento [3] nous avons affaire à un navire de transport réalisé dans le Latium (à cause du ballast de cette provenance) par des charpentiers puniques (prisonniers ?) au service de Rome. Il suggère aussi que le navire aurait commercé dans un port étrusque et qu’il aurait rempli son ballast avec des pierres du nord du Latium après avoir vidé sa cargaison initiale.
Lorsqu’A. Guillerm [4] compare les dimensions de l’épave à celles des hangars du port de Carthage (40x6m) et celles de la trière Olympias (37x5,5m) il estime que le navire 1 devait être une galère importante, peut-être l’une des quinquérèmes décrites par Polybe.

La partie externe était recouverte de feuilles de plomb, fixées à l’aide de clous en bronze. Un tissu imbibé de résine imperméabilisante a été placé entre le placage et le revêtement métallique.
On a découvert sur ce navire de nombreux signes calligraphiques puniques sur la face interne des planches.

La ligne de flottaison est située à 1,20 m dont le tirant d’eau est très faible.

Dans l’ensemble, l’épave donne l’impression que le navire était plutôt neuf quand il a sombré.

La seconde épave

En 1974, à seulement 70 mètres de là, un autre navire a été découvert, dont ne subsistaient que la proue et l’éperon. Il a été alors qualifié de navire-jumeau par l’archéologue et a été baptisé « Sister Ship ». Mais trop peu d’éléments permettent son interprétation.

H. Frost a constaté que la quille semblait bisée en deux par un choc violent car l’axe de la quille à hauteur de la proue et de la poupe se trouve à la perpendiculaire. Il ne semblait pas y avoir de ballaste en pierre mais une certaine épaisseur d’argile repérée sur place devait jouer ce rôle.

Le bois utilisé pour le bordé était en pin, les couples en chêne, mais les chevilles étaient en bois d’olivier. L’éperon était d’une sorte de pin différente de celle du bordé. La quille aussi utilisait probablement le pin [5].

On a découvert sur ce navire aussi des signes calligraphiques puniques sur la face interne des planches.

La structure de l’éperon a été étudiée sous l’eau. C’est une réalisation composée de deux pièces en bois de pin en forme de défense d’éléphant fixées à l’extrémité de la quille et la prolongeant. Entre ces deux pièces courbes il a dû y avoir une autre pièce au milieu car on constate des fentes de mortaises et des clous en fer. Cette pièce centrale devait être le mode de fixation de l’éperon qui a disparu. Les deux pièces courbes en forme de croc avaient été taillées dans le sens du grain afin que la pointe puisse se casser facilement après un choc [6].
D’épaisses couches de tissu tissé, généreusement enduit de résine, étaient clouées et emmaillotaient tout l’éperon. Elles s’étendaient au-delà, sur les côtés de la quille et même sur les gabords.
Une substance qui a la consistance du chewing-gum, de couleur blanchâtre, a été retrouvée entre le support et la quille. Elle a conservé son élasticité même après séchage à l’air. Elle était encore liée à une petite feuille de bronze qui recouvrait visiblement l’éperon.
Il faut donc comprendre cet éperon comme un appendice de la structure de base du navire et non pas comme une extension de la quille elle-même.
L’éperon n’est peut-être qu’un taillemer [7].

Sur la coque elle-même, il n’y a aucun signe de recouvrement au plomb, ni aucun signe de plomb ailleurs sur le site. Ainsi, même si ce navire n’a pas été fouillé, on peut affirmer qu’il est grandement probable que sa coque n’a jamais été recouverte de métal. L’étanchéité est assurée par l’usage d’un mastique dans les joints.

Les membrures sont de la même largeur que celles du navire 1 (10-12 cm) mais leur écartement est plus important ici. Il semble d’après les encoches repérées qu’il y ait eu un plancher. D’autres entailles sur les couples et les varangues ainsi que sur la face intérieure de la quille ne sont pas bien expliquées.

Les archéologues sont peut-être allés un peut vite quand ils ont affirmé que cette proue provenait d’une liburne. Le seul aspect de l’éperon rapproché de ceux des liburnes de la colonne trajane postérieure de 5 siècles ne peut nous satisfaire.

La conservation des pièces de bois

Les bois ont d’abord été trempés dans une eau marine pour entretenir leur contexte et éviter des dégradations au contact de l’air. Ils ont ensuite été placés dans des réservoirs d’eau douce, puis replongés dans un réservoir avec de la cire synthétique (polyéthylène glycol - PEG 4000 au pourcentage élevé) dissoute dans l’eau à différentes concentrations et températures.

Le navire 1 a été exposé au musée en 1978, mais pendant 21 ans, il est resté sous une bâche car les conditions architecturales du musée n’étaient pas adaptées. Il s’agissait d’un simple hangar à vin du XIXe siècle. Les pièces du navire ont souffert de la corrosion, du vent et de la pluie. Dès lors, on décida en 1980 de la recouvrir d’une bâche. En fait, il ne pouvait être admiré que par quelques fenêtres en plastique transparent placées sur les côtés du toit.

En 1986, la communauté des archéologues s’insurgea de la dégradation des supports comme des pièces de bois[H. Frost, 2002]]. Les pétitions du HIPNT (Hellenic Institute for the Preservation of Nautical Tradition), de France et du Royaume Uni exigèrent un hébergement à la hauteur. Avec l’aide des Danois, dont le prof. Ole Crumlin Pedersen, de l’architecte muséographique Alan Irvine, de l’ingénieur naval de la mission de fouilles anglaise Austin Farrar, et du centre régional de conservation à Palerme, on imagina une seconde reconstitution qui respecte le navire et qui le montre en entier au public.

Au début, seules les pièces de bois démontées ont été exposées. Le navire tout entier n’a été assemblé qu’après que des techniciens locaux, les frères Bonanno, constructeurs de bateaux, ont réussi à reconstruire le navire sous la direction d’A. Farrar, grâce aux lettres et signes apposés sur le matériel récupéré.

Les pièces d’origine ont été assemblées sur des supports spéciaux. Puis la coque du navire a été complétée par des pièces neuves visibles à l’œil nu par la couleur différente du bois afin de ne pas tromper le visiteur.

En mai 1999, l’installation d’un système de climatisation a pu maintenir l’humidité et la température constantes. Ceci a permis de créer un climat propice à une conservation optimale. La bâche a été retirée et le navire a été rendu visible au public.

Datation et origine

Ces deux navires sont datés au carbone 14 du milieu du IIIe s ou autour de 235 av. J.-C.
Ce sont les inscriptions en alphabet phénicien repérées sur les bois des épaves qui ont permis d’attribuer sans aucun doute les vestiges aux Carthaginois.
Pourtant Maurizio Vento réfute cette attribution : il s’appuie sur l’origine du ballaste du navire 1, provenant fort probablement du Latium, pour y voir un navire romain construit par des charpentiers carthaginois prisonniers. Il faudrait alors considérer que ce navire en était à son 1er voyage ou qu’il n’a jamais connu de chargement/déchargement complet.

La cargaison de l’épave 1

Aucune cargaison d’ampleur n’a été trouvée dans ces 2 épaves contrairement aux caractéristiques des épaves de navires marchands. Cela peut être dû à l’échouage qui a rendu possible la récupération tant de la cargaison que d’autres éléments de valeur.

La présence de ballast (des pierres peut-être originaire du Latium), plutôt que d’une cargaison lourde composée d’amphores de stockage, renforce l’hypothèse d’une destination militaire des bateaux.

Les archéologues ont cependant retrouvé des éléments de vaisselle (des tasses, des assiettes, des bols, un mortier) destinés à un usage individuel. Ils ont aussi trouvé un poignard, des fragments d’un panier, d’une corde, des bouchons de liège, un petit pinceau et des fragments de tiges de cannabis dans le panier destinées sans doute à être mâchées par les rameurs et réduire leur sensation de fatigue. Ils ont trouvé également des noyaux d’olives et des coquilles de noix ; le navire a peut-être coulé en automne ou en hiver, en l’absence de restes de fruits frais. .

L’analyse des restes osseux montre que le navire contenait de la viande de boucherie diverse : cerfs, chevaux, bœufs, mouton, chèvre, porc. Les restes d’ossements humains (vertèbre, radius et fémur) témoignent sans doute d’une ou deux victimes ayant été prise au piège de l’échouage, ainsi qu’un chien.

Les techniques de construction navale

L’étude de ces 2 navires a fait évoluer notre connaissance des techniques employées au IIIe siècle av. J.-C. pour construire des navires. Cette découverte archéologique semble justifier l’étonnement des auteurs romains antiques sur la remarquable rapidité de construction de ces navires puniques. Pour Appien [8], les carthaginois étaient capables de construire plusieurs dizaines de trirèmes et de quinquérèmes pendant le siège de 146 a. J.-C.
Cette rapidité semblait jusque-là peu vraisemblable. Pourtant les navires de Marsala allaient révéler tout un savoir faire.

Sur chaque planche de la quille on a retrouvé des signes alphabétiques. Des mots puniques ont même été identifiés. Ils figuraient sur le côté interne de la quille et de la coque. Il a été montré qu’ils étaient destinés à faciliter l’assemblage.
En fait il permettaient d’indiquer la position de chaque pièce de sorte qu’ils permettaient un véritable gain de temps. Une vraie technique rationnelle a été conçue pour optimiser la construction, ou le remontage après le stockage d’une durée indéterminée.
Chaque pièce pouvait être réalisée par des menuisiers en nombre importants selon un processus standardisé et elles pouvaient être stockées méthodiquement dans les entrepôts du port. Les charpentiers navals pouvaient utiliser les pièces à leur disposition sans attendre leur façonnage. Les chantiers navals pouvaient travailler ainsi en toutes saisons selon une méthode rationalisée, parfois qualifié de système « préfabriqué ».

Les techniques d’assemblage de l’époque faisaient débuter par le bordé puis par les membrures. Les charpentiers ajustaient les planches du bordé bord à bord et ils les maintenaient par un système de tenon et mortaises chevillés. Il s’agit, dans ce cas, d’une construction à franc bord. Les varangues reposant sur la quille, et des demi-couples étaient ensuite chevillés au bordé
Les joints étaient calfatés à l’aide de filasse (ou étoupe) appliquée en force en frappant avec un maillet. La filasse était ensuite protégée par un enduit fait de poix bitumineuse ou résineuse. Par exemple, lorsque les pins sont gros, on peut en tirer la résine avant de les abattre et ensuite les débiter en planches.

À Marsala les charpentiers on commencé par assembler la quille et les gabords, c’est à dire la première virure (planches) qui s’incruste dans la quille, grâce à des tenons. La quille est trop longue pour être constituée d’une seule pièce. Ils les ont taillé à l’herminette pour leur donner leur forme propre et la plus ajustée, et pour que les angles soient constant et qu’ils permettent la fixation avec les tenons. Ils ont continué en plaçant les virures du bordage sous la ligne de flottaison.
L’ensemble a été consolidé par la mise en place des couples, des varangues et des barrots. Le bordé n’a été complété qu’à la fin. On note une différence de traitement entre les planches situées sous la ligne de flottaison et celles situées au-dessus de celle-ci : le bord inférieur des virures au dessus de la ligne de flottaison possède un renflement destiné à éviter les éclaboussures sur le pont lorsque le navire allait à vive allure.
M. Reddé insiste sur le renfort longitudinal qui a été découvert le long de la coque sur cette épave, et qui faisait office de vaigrage. Les bois de ce renfort portaient en outre l’emplanture d’épontilles, ces poutres verticales qui supportaient le plancher du pont.
A la poupe la quille se relève brusquement et forme un angle vif vers l’arrière. Cette pièce est prolongée par un étambot fixé par des chevilles.
Sous la longueur de la quille, M. Reddé remarquait qu’on n’a pas retrouvé de fausse quille.

Les modes de propulsion

Rappelons l’évidence : les fouilles n’ont découvert aucune rame, ni aucun mat. Il ne subsiste rien non plus de la superstructure des deux navires découverts. Si ces éléments n’ont pas été récupérés après le naufrage, ils se sont décomposés et ont été définitivement perdus. Nous ne pouvons rien apprendre directement sur ces éléments importants pour nous permettre de comprendre le type de navire auquel nous avons affaire, et quel agencement était conçu à l’intérieur de la coque.

La longueur estimée du navire 1 à une trentaine de mètres de longueur a permis à H. Frost [9] d’envisager 17 rames par bord en utilisant un ratio théorique de 1,40 m entre chaque. Pourquoi pas. Mais rien ne vient prouver l’exactitude de la longueur et du calcul. Et pourquoi pas une, deux ou trois rames de plus ou de moins ? Il faut donc prendre ces chiffres avec précaution et non pas comme des certitudes.
Les calculs comparatifs d’A. Guillerm [10] sont séduisants. Ils s’adaptent aux dimensions des hangars du port de Carthage, là où Polybe affirmait que les carthaginois stockaient des quinquérèmes. Il imagine alors que l’épave devait être un navire de 3 rangs de rames, 1 ou deux rameurs par rame, c’est à dire un navire imposant et non pas une petite liburne.
Michael Leek a tenté deux reconstitutions : l’une est basée sur un seul rang de 17 rames, l’autre est plus imposante car est basée sur 2 rangs de 35 rames mues par 2 ou 3 rameurs chacune. Toutes les deux sont belles et agréables mais elles ne peuvent être considérées comme des certitudes.

Tout aurait été bien différent si nous avions pu découvrir une partie du bordé jusqu’au plat bord, avec un tolet de support des rames ou au moins deux pour obtenir l’écartement entre chaque rame. Il aurait été formidable de découvrir des barrots, ces traverses horizontales pour savoir si ils étaient des supports au pont ou à des bancs de nage où s’asseyaient les rameurs. Mais il n’en est rien.

Le mat n’a pas été retrouvé, mais l’emplacement du mat non plus. Aucun détail sur les restes de la quille ne permettent d’en définir son emplacement et son mode de fixation. Tout comme l’absence de rame n’a pas conduit à imaginer leur absence réelle sur le navire, l’absence de la découverte du mat ne peut nous conduire à affirmer son absence réelle. Toute interprétation autour d’un navire dépourvu de mat n’a aucun fondement scientifique.

Interprétation

Pour l’archéologue H. Frost, l’épave 1 serait les restes d’un navire de guerre échoué à proximité de Lilybée (Marsala) le 10 mars 241 av. J.-C suite à la bataille des îles Egades qui mit fin à la Ière Guerre Punique.
Si cette hypothèse peut être soumise aux critiques, celles de Maurizio Vento qui y voit un navire romain le sont encore bien davantage. Rien ne dit que le navire de Marsala en était à son 1er voyage : bien qu’il apparaisse neuf oli a pu voguer quelques semaines ou quelques mois. Son ballast a pu être chargé antérieurement, suite à une opération commerciale dans le Latium ou ailleurs, et le navire a pu ensuite servir aux opérations militaires pendant la Ière Guerre Punique selon la proposition de H. Frost.

Trop de scenarios sont basés sur des hypothèses et sur des interprétations des absences (rostre, cargaison, parties manquante de la coque, mat et voile, etc.) qui ne peuvent être considérées comme des preuves. En effet il ne faut pas oublier que les 2 navires ont dû s’échouer sur la plage ou à proximité à faible profondeur. Tout ce qui avait de la valeur a sans doute été récupéré. Tout objet manquant dans les fouilles du XXe siècle ne peut être appliqué à la vie du navire sans tenir compte de son sort après son échouage.

Puisqu’il nous manque la superstructure des deux navires, il me semble vain de vouloir déterminer la nature de l’usage de ces 2 témoins du IIIe s. av. J.-C. Bornons nous à respecter ce qu’ils nous enseignent avec certitude : des techniques de construction bien plus méthodiques qu’on ne l’imaginait, un profil de navire long plutôt que de navire rond, l’usage d’un ballast. Rien ne peut affirmer un lien direct entre l’échouage et une bataille rapportée par les auteurs antiques.

Parmi ces hypothèses il existe des éléments qui semblent faire l’unanimité. Le navire semble de type punique, un navire long, sans doute carthaginois et on peut imaginer qu’il a pu être stocké dans des hangars comme ceux du port de Carthage (40x6m). L’expérience de l’Olympias autorise à imaginer jusqu’à 3 rangs de rames pour sa largeur.

Je fais le voeux que chaque hypothèse d’interprétation ne demeure qu’une hypothèse et que nous puissions nous éviter des débats trop passionnés. Restons sur le passionnant : décrivons nos interprétations, utilisons tous les moyens à notre disposition pour les illustrer (dessin, reconstitution navigable, modèles réduits, élaboration virutelle 3D). Toutes les hypothèses feront avancer nos réflexions mais elles ne nous ramèneront pas les parties manquantes qui nous auraient assurément émerveillées et qui seraient les meilleurs preuves.


[1Frost, 1976 ; Reddé, Mare Nostrum, p.16

[2R. Giglio (2007), Lilibeo e il mare...

[3Maurizio Vento (2000), La nave punica di Marsala

[4A. Guillerm, 2002

[5Frost, 1976 ; Reddé, Mare Nostrum, p.16

[6Frost ; Reddé, p. 86

[7G. Purpura

[8Appien, Libyca,121

[9Lilybaeum, H. Frost and alii, 1976

[10A. Guillerm, 2002


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